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Mais de combien d’autres nations l’attitude ne nous paraît-elle pas indécise ! À en croire les assurances données par M. Radoslavoff à M. Savinsky, ministre de Russie, la Bulgarie serait décidée à ne provoquer aucun trouble en Macédoine et à ne pas se trouver en conflit avec l’empire des tsars44 ; mais à Nisch, M. Pachitch répète à M. Boppe qu’il s’attend à des actes de vengeance du roi Ferdinand contre la Serbie et contre la Roumanie45.

La conduite de la Turquie est encore plus suspecte. Le grand vizir a, il est vrai, affirmé au représentant de la Russie que la Porte ne permettrait pas au Gœben et au Breslau de passer les détroits46. Mais, en attendant, les deux croiseurs rôdent, comme des corsaires, dans la mer Égée, et il semble bien que, dès maintenant, ils soient d’accord avec les Turcs pour aider ceux-ci à faire la diversion que l’Allemagne attend d’eux sur les derrières de la Russie. La Porte a donné le commandement de la 1re armée à Liman von Sanders, devenu Liman Pacha, qui a conquis un incroyable ascendant sur Enver Pacha et, par celui-ci, sur le Conseil des ministres auquel il est souvent appelé à prendre part. À Angora, à Smyrne, le commandement du IVe et du Ve corps est échu à des colonels allemands. Les Allemands sont partout en Turquie et y commandent en maîtres comme chez eux47. Les appréhensions dont la Russie nous faisait part, il y a quelques mois, à la suite de la mission Liman von Sanders, n’étaient donc que