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chaque jour plus rapides et plus larges en munitions de tous genres.

Lui-même, d’ailleurs, le commandement a pu retenir avec profit la leçon des erreurs initiales ; il a fait un apprentissage qui n’a point été inutile ; il à peu à peu abandonné quelques théories préconçues ; il s’est adapté à des circonstances qui ont réservé à tout le monde une grande part d’imprévu. Nous avons donc le droit d’espérer qu’avec de la volonté et de la persévérance, nous arriverons à forcer la victoire. En tout cas, mon devoir personnel est très clair : tenir, et tâcher d’inspirer la patience aux hésitants et la confiance aux pessimistes.

Jeudi 10 décembre

Millerand, arrivé de Bordeaux ce matin, va aujourd’hui au G. Q. G. de Chantilly. Il tâchera d’y régler avec le général Joffre la question qui intéresse à la fois le régime militaire de Paris et le sort du général Gallieni.

Millerand a, me dit-il, reçu la visite de sir Francis Bertie, qui est venu, de la part de lord Kitchener, lui demander s’il ne serait pas possible que l’armée britannique fût transportée à l’extrême gauche du front, de manière à s’appuyer sur la mer du Nord. À l’heure présente, nous conservons des troupes le long des dunes pour flanquer l’armée belge à sa gauche et l’armée anglaise reste placée à la droite de l’armée belge. En transmettant cette demande, sir Francis a pris sur lui d’ajouter, à titre personnel et privé, que Kitchener l’avait, sans doute, présentée sans consulter French, que le ministre ne se conduisait pas en cette affaire comme un gentleman et qu’il se mêlait de ce qui ne le regardait pas. Mais, à