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que les Allemands faits prisonniers par les Belges sont très démoralisée. Tous disent que leurs chefs leur avaient affirmé qu’ils seraient accueillis en Belgique à bras ouverts. Mais nous aurions grand tort de nous laisser éblouir par des récits trop agréables et de sous-évaluer la force militaire de l’ennemi. Le général Joffre, lui, la connaît et il voudrait que l’Allemagne ne parvint pas à nous devancer. Il m’envoie par un de ses officiers la lettre suivante : « Vitry-le-François, le 9 août 1914. Monsieur le président, je suis prévenu que le premier jour de la mobilisation des forces anglaises, qui doivent être employées sur le continent, est le 9 août seulement, ce qui retarde jusqu’au 26 août la date à laquelle ces forces seraient en mesure de se porter en. avant. » Or, il ne nous est pas permis d’attendre jusqu’à cette date pour nous porter à la rencontre des armées allemandes, sous peine de perdre tous les avantages que peut nous procurer la priorité de l’action. Je suis donc déterminé à ne pas attendre pour agir l’arrivée des troupes anglaises. L’appui ultérieur de ces forces sera néanmoins d’une grande importance dans le développement des opérations, à la condition que leur arrivée ne soit pas trop tardive. Peut-être l’état-major anglais pourrait-il activer les mesures préparatoires initiales. J’estime qu’il conviendrait de faire part au gouvernement anglais du grave inconvénient qu’aurait un long retard dans l’arrivée des troupes anglaises. En ce qui concerne les forces belges, je suis heureux d’avoir pu constater l’énergie qu’elles ont montrée pour la défense de Liége. Notre cavalerie, grâce à l’activité du général Sordet, a pu leur apporter, en temps utile, sinon un appui matériel, du moins un réconfort moral.