Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/47

Cette page n’a pas encore été corrigée

Je ne le crois pas. Ces messieurs m’ont demandé s’il était vrai que les Anglais et les Français allaient se porter au nombre de quelques centaines de mille sur Namur. J’ai répondu que je n’en savais rien, mais que si je le savais, je ne le dirais pas. Ils m’ont encore demandé si nous avions rattrapé notre retard de mobilisation. J’ai répondu : en grande partie. Enfin, ils tenaient à être bien sûrs que j’étais très confiant. Je leur ai donné toutes les assurances désirables à cet égard. Ce qui est intéressant, c’est que le même homme, qui disait hier que l’Italie ne pouvait pas marcher en ce moment, venait m’apporter des affirmations toutes contraires. Cela peut s’expliquer assez facilement. Signé : G. CLEMENCEAU. » — P.-S. « J’ai eu soin de leur répéter à plusieurs reprises que l’ardeur avec laquelle l’Angleterre s’engageait à fond avait dépassé nos espérances. » Je communique immédiatement cette note à M. Doumergue et je le prie de vouloir bien se renseigner à Rome, car j’ignore quelle peut être l’influence de M. Sabini et de l’attaché militaire sur le gouvernement italien. M. Tittoni, qui était en croisière, au moment où la guerre nous a été déclarée, n’est pas encore rentré à Paris. Quant à M. Clemenceau, l’impétueux optimisme que lui inspire aujourd’hui son fervent amour de la France contraste heureusement avec l’aigre pessimisme des dernières observations qu’il a, en juillet, présentées au Sénat. Peut-être la vérité est-elle dans l’entre-deux.

La journée s’achève sans que nous ayons les moindres clartés sur l’ensemble de la manœuvre allemande. Aussi bien, dans une instruction générale n° 1, datée du 8 août, le général Joffre a-t-il retenu l’hypothèse, qui lui parait encore vraisemblable,