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CHAPITRE IV


Voyage en Russie. — Le Condé. À Cronstadt et à Saint-Pétersbourg. — Séjour à l’ambassade de France. Conversations avec M. Sazonoff et M. Kokovtzoff.


Dès les premiers jours du ministère, l’esprit de solidarité qui n’a cessé de nous animer s’était manifesté dans une décision de principe que nous avions prise et que les incidents ultérieurs nous ont amenés à confirmer. Le peu de confiance que nous avions en M. Isvolsky, surtout après le rôle qu’il avait joué en 1911, le manque de liaison que nous sentions entre le gouvernement russe et la France, l’impression qu’il y avait peut-être dans l’alliance quelque chose de fêlé, avaient déterminé mes collègues, et plus particulièrement MM. Briand et Léon Bourgeois, à penser qu’il pourrait être utile que, pendant les prochaines vacances parlementaires, j’entreprisse le voyage de Saint-Pétersbourg. M. Sazonoff était venu à Paris en décembre il était naturel que sa visite lui fût rendue. Dès les premières plaintes que le ministre russe avait émises contre M. Georges Louis et dont M. Isvolsky s’était fait d’abord l’écho timide, mais fidèle, le désir de dissiper ces malentendus avait fortifié le cabinet dans son intention. La venue de notre ambassadeur à Paris et son renvoi à Saint-Pétersbourg laissaient, dans les relations