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ENTRETIEN AVEC PÉTAIN

et pittoresque les impressions de son dernier voyage au front.

Pichon lit quelques télégrammes. Il fait remarquer que nous ne sommes pas encore officiellement informés de la capitulation russe. Il la considère cependant comme certaine.

Sous l’influence de Clemenceau, il propose de remplacer nos agents à Buenos-Aires et à Montevideo. De motif, aucun, sinon l’envie de changer. Il parle également de la mission de Lutaud en Russie et personne ne sait en quoi elle consiste.


Mercredi 27 février.

Dubost vient me lire un discours qu’il doit prononcer vendredi à une cérémonie de la Sorbonne et qui a trait à l’Alsace et à la Lorraine. Le discours a le mérite de la netteté patriotique et de la brièveté. Dubost me lit également une lettre de Micheler que, sur mes conseils, il a calmé et qui est, du même coup, devenu beaucoup moins pessimiste.

Grosdidier, sénateur de la Meuse, ne veut pas encore croire à la culpabilité de Charles Humbert. Tout au plus, admet-il qu’il puisse y avoir commerce avec l’ennemi.


Jeudi 28 février.

Pétain, qui a vu Clemenceau ce matin, se dit très satisfait de leur conversation. L’armée de réserve a vécu. On lui laisse ses réserves à lui-même. Il me confirme ce que m’avait dit Clemenceau, que Haig aurait plutôt démissionné que d’accepter une armée de réserve mise à la disposition du Comité de Versailles. Clemenceau, dit Pétain, s’est rendu de très bonne grâce à ses objections.

En revanche, Pétain me paraît très pessimiste sur la prochaine campagne. Si la bataille dure plus