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LA VICTOIRE

plus de 40 ou 50 000 indigènes. Encore ne faut-il pas exclure l’hypothèse de révoltes partielles. Il faudra en tout cas employer d’autres méthodes que la dernière fois. Il me dit qu’environ 50 pour 100 des noirs sont musulmans. L’Islamisme les transforme totalement. Autant ils sont soumis tant qu’ils sont fétichistes, autant, devenus musulmans, ils sont orgueilleux.

Pams vient me faire signer un décret pour le quitus de ses fonds spéciaux. Il m’explique qu’il a reçu 200 000 francs des Affaires étrangères, dont il a fait usage pour la Sûreté et pour une surveillance en Suisse. Il ne donne, dit-il, à la presse que des sommes insignifiantes, des secours individuels. La grève lui a coûté, en revanche, des fonds importants, et aussi le congrès de Clermont-Ferrand. « J’ai dû, ajoute-t-il, payer des agents pour détourner certains ouvriers du mouvement pacifiste et aussi pour les empêcher de faire cause commune avec Caillaux. » Il affirme que Caillaux est maintenant très déprimé et que Bouchardon le manœuvre comme il le veut. Il se plaint que Clemenceau laisse trop de liberté aux campagnes des journaux pacifistes et il me cite ce mot d’un sénateur mécontent : « En somme, le Cabinet laisse faire publiquement ce que Clemenceau reprochait à Malvy de laisser faire en secret. » Et, ajoute Pams, lorsqu’on trouve des formules comme celle-là pour exprimer une critique justifiée, on a bien des chances d’être écouté. Je voudrais, conclut-il, que vous pussiez m’aider à convaincre Clemenceau. — J’y suis, dis-je, tout prêt. Je lui ai déjà parlé dans le même sens que vous ; je recommencerai. »


Samedi 2 février.

Le roi des Belges, qui passe incognito à Paris, me rend visite à six heures et demie. Il est arrivé