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L’ALLEMAGNE ET LE MAROC

térêts au Maroc ; après avoir répété cette déclaration, sept ans plus tard, au marquis de Benomar, ambassadeur d’Espagne à Berlin ; après avoir renouvelé les mêmes assurances, le 12 janvier 1903, devant M. Bihourd, notre ambassadeur ; après avoir proclamé, en 1904, qu’elle n’avait pas d’objections à présenter contre notre accord du 8 avril avec l’Angleterre, l’Allemagne, tout à coup, s’était ravisée. L’Allemagne ou l’Empereur, je ne sais ; mais, jusqu’en 1918, c’est tout un. Le 31 mars 1905, le yacht impérial Hohenzollern se présente devant Tanger ; Guillaume II débarque et, dans un discours provocant, s’écrie : « .Ma visite a pour but de faire savoir que je suis décidé à tout ce qui est en mon pouvoir pour sauvegarder efficacement les intérêts de l’Allemagne au Maroc. » Puis, dès que le Sultan, habilement circonvenu, invite les puissances à une conférence, le baron de Lanken, chargé d’affaires, homme lige de l’Empereur, et le prince de Radolin, ambassadeur, reçoivent l’ordre de venir successivement adresser à M. Rouvier, président du Conseil, cette menace : « Il faut que vous sachiez que l’Allemagne est derrière le Maroc. » L’acte d’Algésiras est signé le 8 avril 1906. Aussitôt recommencent au Maroc les manœuvres des agents de l’Allemagne, les Karl Ficke et les Mannesmann. Sous les auspices du consul impérial, M. Lüdenitz, une agence est créée à Casablanca pour pousser les légionnaires à la désertion. Éclate, dans ce port marocain, l’incident du 25 septembre 1908, consécutif à ces intrigues, et de nouveau le ciel s’assombrit. C’est l’année où, d’autre part, l’Autriche vient d’annexer la Bosnie et l’Herzégovine et où l’empereur d’Allemagne s’est placé, dans son armure éclatante, auprès de son