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LA COMMISSION DU SÉNAT

pour associer, — dans l’empire chérifien, les intérêts industriels et financiers, des Français et des Allemands, sur les obstacles auxquels s’était heurté le projet de coopération, sur les circonstances qui avaient amené l’expédition de Fez et sur les fameuses entrevues qu’avaient eues, à Kissingen, M. de Kiderlen-Wæchter et notre ambassadeur, M. Jules Cambon.

Le jeudi 28 décembre, la Commission m’avait, par un vote unanime, nommé rapporteur provisoire. J’avais déclaré que je me proposais de conclure au vote du traité. Si pénible qu’il me fut de me mettre, à cet endroit, en opposition avec les députés de l’Est, je ne pouvais hésiter à me séparer d’eux. La déclaration collective qu’ils avaient lue à la séance du 20 novembre avait été, comme ils l’avaient eux-mêmes dit à la Chambre, improvisée au cours des débats. Ils ne méconnaissaient rien, avaient-ils affirmé, « des laborieux et patriotiques efforts de nos négociateurs ni des résultats par eux obtenus. » Ils entendaient « demeurer les adversaires résolus de toute politique d’agression », mais, avaient-ils ajouté, ils ne voulaient pas, en ratifiant la convention, « paraître souscrire à un rapprochement qui, en l’état actuel des choses, aurait dans notre Lorraine mutilée un douloureux retentissement. »

Les signataires n’avaient consulté ni M. Lebrun, député de Meurthe-et-Moselle, qui était alors ministre des Colonies, et avait, en cette qualité, participé à la préparation du traité, ni moi qui, sénateur de la Meuse, vivais depuis plusieurs années, fort éloigné du Palais-Bourbon.

Surpris et affligé d’une abstention qui semblait