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LE TRAITÉ FRANCO-ALLEMAND

à l’Allemagne que nous déchiffrions ses télégrammes ? Et comment, d’autre part, accepter les yeux fermés tout ce qui s’y trouvait rapporté ? Le débat se poursuivit sans autre alerte. De séance en séance, MM. Charles Dupuy, de Goulaine, Gaudin de Villaine, de Las Cases, d’Estournelles de Constant, Pierre Baudin, Goirand, se succédèrent à la tribune. Puis M. Stephen Pichon disséqua sévèrement le traité et conclut qu’il ne le voterait pas. M. d’Aunay laissa, au contraire, entendre qu’il le voterait, mais sans enthousiasme. M. Ribot exposa, dans un discours admirable, toutes les raisons qui faisaient au Sénat un devoir de hâter la ratification des accords ; il ne toucha que d’une main délicate aux points encore sensibles et voila d’une ironie légère ses critiques du passé. Après lui, M. Méline parla excellemment des questions économiques et douanières ; et le samedi, m’attendant à une réplique de M. Clemenceau et ne voulant pas laisser le débat s’éterniser, je montai à la tribune.

Je rappelai que, devant la commission, j’avais, comme rapporteur, annoncé que, malgré les lacunes du traité, je conclurais à l’adoption, a Le traité n’est pas parfait, disais-je ; il ne pouvait pas l’être ; mais il me paraît indispensable qu’il soit voté. » Je m’efforçais de prouver que, même aux heures où l’acte d’Algésiras et l’accord franco-allemand de 1909 avaient été le plus aisément appliqués, ils n’avaient jamais, ni l’un ni l’autre, valu ni pu valoir pour la France la convention du 4 novembre 1911[1]. Je pesais les sacri-

  1. M. Fr. Charmes, sénateur, écrivait, le 15 février 1912, dans