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LA COMMISSION DU SÉNAT

vernement italien avait affirmé, de nouveau, à notre chargé d’affaires, M. Legrand, que les Turcs étaient des officiers et les choses traînaient en longueur.

L’après-midi, j’étais allé, avec M. Steeg, au Palais-Bourbon, pour faire connaître à la commission du suffrage universel les vues du gouvernement sur la réforme électorale. La Chambre avait déjà voté, sous les cabinets précédents, la substitution du scrutin de liste, avec représentation des minorités, au scrutin d’arrondissement, ainsi que la règle du quotient. J’avais eu à m’expliquer sur « l’apparentement » et sur « l’attribution des restes ». Avant et après la séance, tous les députés présents m’avaient instamment prié de répondre, le plus tôt possible, aux questions que plusieurs d’entre eux, MM. Laroche, Guernier, l’amiral Bienaimé, avaient manifesté l’intention de me poser, à propos du Carthage et du Manouba. Je leur avais dit que j’attendais encore des informations et que j’espérais être en mesure de renseigner la Chambre le surlendemain lundi. Mais depuis trois jours, M. Tittoni n’était plus sorti de chez lui, il souffrait d’une bronchite opportune et s’était alité. Le lundi, les fâcheux incidents n’étaient pas encore réglés. L’impatience de la Chambre était telle que je ne crus pas devoir retarder davantage mes explications. Je fus écouté avec une attention soutenue et une faveur marquée. Je fis, en détail, l’historique des deux malencontreuses affaires ; pour chacune, j’établis, avec une extrême modération de langage, le bon droit de la France. Je montrai qu’un aéroplane n’était pas un instrument de guerre saisissable à bord d’un navire neutre ; j’ajoutai que le Carthage,