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LE LENDEMAIN D’AGADIR

principe de l’assurance à celui de l’assistance ; faire voter le budget en temps utile ; accélérer au Sénat l’étude du projet d’impôt sur le revenu ; concilier notre puissance financière avec la nécessité de la défense nationale tels furent les points que je touchai rapidement et sur lesquels se fit notre accord. Il fut convenu que je rédigerais la déclaration le lendemain : dimanche 14 janvier et que nous nous réunirions ensuite à quatre heures de l’après-midi pour la lire. Les décrets de nomination des ministres et sous-secrétaires d’État seraient également signés le dimanche et paraîtraient le lundi à l’Officiel. Le soir même, nous donnions aux agences la composition du cabinet, qui, fait sans précédent, avait été formé dans l’espace d’une journée.

L’accueil de la presse fut exceptionnellement favorable. Quelques journaux, tenant un peu vite pour acceptée par le Conseil l’idée d’une vice-présidence solennellement instituée par décret, annoncèrent que M. Briand allait recevoir cette investiture inusitée. Il n’en fut rien. Mais chaque fois que, par la suite, j’en trouvai l’occasion, je le priai de me suppléer et il prit, d’ailleurs, l’habitude de venir très souvent conférer avec moi des affaires générales.

Le dimanche matin, je rendis compte à M. Fallières de la constitution du Cabinet. Il ne me cacha point qu’il était soulagé d’un grand poids et ravi de la combinaison. Je rentrai chez moi et rédigeai la déclaration. Je la communiquai dès 4 heures à mes collègues, dans un conseil réuni au ministère de la Marine, dont M. Delcassé avait mis les salons à notre disposition. Mon texte fut adopté sans objections, notamment les passages qui touchaient à la politique étrangère. « Dans les circonstances présentes, nous avons pensé, disais-