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LA COMMISSION DU SÉNAT

monde la mieux partagée », il reste, là comme ailleurs, « le maître de la vie humaine. » J’étais sûr d’avoir en lui un homme de jugement et d’expérience. Je lui confiai le portefeuille des Travaux publics.

Mais le délai demandé par M. Briand et les hésitations de M. Guist’hau, suite naturelle d’une indissoluble amitié, risquaient de retarder la constitution du ministère. Je conviai chez moi, pour la fin de l’après-midi, tous ceux dont je désirais la collaboration, notamment trois membres du cabinet Caillaux, M. Klotz, ministre des Finances, dont rien ne me paraissait justifier le remplacement, M. Lebrun, que je souhaitais de conserver au ministère des Colonies, M. Steeg, qui avait montré, au ministère de l’Instruction publique, de sérieuses qualités d’esprit et que je comptais faire passer de la rue de Grenelle à la place Beauvau. Radical-socialiste, il devait être bien accueilli de la majorité de la Chambre. Sa droiture et sa probité lui avaient valu le respect de tous ses collègues. Il s’était déclaré partisan de la représentation proportionnelle et il était prêt à poursuivre la discussion commencée.

Tout le monde fut exact au rendez-vous, M. Briand comme les autres. Il était cependant encore indécis. Ses meilleurs amis lui firent comprendre que sa présence immédiate au ministère de l’Intérieur indisposerait la gauche et qu’il était de son intérêt de patienter. Il se résigna. Je lui renouvelai l’assurance qu’il serait étroitement associé à toute la politique du Cabinet. Je me proposais, en effet, de vivre en confiante intimité avec mes collègues, de les renseigner et de les consulter sur tout, et de faire de la solidarité