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LE LENDEMAIN D’AGADIR

par nous croire délivrés de la rivalité germanique dans l’empire chérifien, que nous avions ensuite cherché à nous y entendre et même à y collaborer avec l’Allemagne, mais qu’après avoir fait ; avec un peu de hâte, quelques pas au-devant d’elle, nous nous étions parfois repliés avec précipitation, que nous avions, en somme, manqué d’esprit de suite et que l’envoi d’une canonnière devant Agadir avait été une réponse insolente et brutale à nos gestes d’indécision. Le récit du président du Conseil avait été si lumineux et si puissante sa démonstration, que, presque tout entière, la Commission avait senti la nécessité d’approuver rapidement le traité et que le cabinet, assez malmené depuis quelques semaines, dans les couloirs du Luxembourg, pouvait se considérer comme définitivement raffermi.

C’est à ce moment que, je ne sais sous quelle inspiration, aveuglé peut-être par le légitime succès qu’il venait d’obtenir, M. Caillaux crut devoir ajouter deux mots, que personne ne lui demandait.

« On a essayé, dit-il, d’établir, dans la presse et ailleurs, que des négociations avaient été poursuivies en dehors du ministère des Affaires étrangères. Je donne ma parole qu’il n’y a jamais eu de tractations politiques ou financières d’aucune sorte, autres que les négociations diplomatiques et officielles.[1] »

Aussi spontanée qu’inattendue, cette dénégation provoqua un étonnement général, dans une

  1. V. les Négociations de 1911, par Outis. Extrait de la Revue du Mois du 10 janvier 1913, Félix Alcan (page 1). — Le Coup d’Agadir, par Pierre Albin ; Félix Alcan, 1912 (page 327). — M. Mermeix, Chronique de l’an 1911. — M. André Tardieu, le Mystère d’Agadir.