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Dans leur contenance, ils résistaient avec autant de naturel contre un rapprochement qu’ils s’entendaient en réalité l’un et l’autre.

Hardy, d’un blond ardent, avait des yeux « de carpe frite, » le nez très joli. Ludine, qui ne supportait d’un homme ses mains aux entournures de son gilet, aimait celles de Hardy dans les poches de son veston boutonné jusqu’au haut. Irréprochablement ganté toujours, il s’asseyait à califourchon sur une chaise, et tous deux, sans que jamais il lui fit de compliments, partaient à bouffonner.

Jamais non plus il ne lui parlait de femmes, de ses rares maîtresses d’une nuit. Cette réserve était-elle affectée ? n’était-elle pas commandée plutôt par le savoir-vivre ? Cependant il cultivait une femme rangée. Quittant ses amis le soir, il se rendait d’habitude, toujours sans rien dire, chez celle là. Et Ludine lui savait gré de ces silences sur elles. Ne lui prouvait-il pas ainsi quelque prédilection plus haute, raffinée ! Elle l’en estimait un gentleman.