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se grisait avec de la bière, dont elle avait toujours sur sa table de nuit une bouteille. Habitude que cette Lyonnaise avait prise à un Suisse. Se cachant de son hystérie, peut-être elle trompait, en buvant, ses rages… Quand un vieux fabricant de soie lui prit sa virginité, elle était à peine formée, et tombant malade fut à l’hôpital faire ses couches. Maintenant, quoique largement entretenue, elle trompait son amant à plaisir. « Je ne tromperai jamais, disait-elle, autant qu’on m’a trompée. »

Dans un petit pavillon, au jardin, des poules caquetaient, picoraient, avec leurs allures pressées de bonnes femmes, des perroquets blancs terminaient la même phrase toujours. Là logeait avec ses bêtes une vieille dame milanaise, noble ruinée, qui vous exhibait les photographies de ses ancêtres. Mme Delamousse avait eu l’art de louer à cette rentière, la choyait. Faisant la causette avec Lazarine, celle-ci se montrait furieuse d’avoir perdu sa fortune dissipée par son mari avec des danseuses. Elle ne jouissait plus que d’une petite rente faite par son frère consul. Quoique invitée aussi pour prendre le café, Ludine n’y allait pas, incrédule aux racontars de la dame, à ses cotillons dansés à la cour. Guinche comme ça et danser, c’eut été par trop moquable !