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enfin, dans ce monde de moins d’hypocrisies, elle se complaisait à faire une morale point bête, qui, par un mot à double entente rétorqué à propos, met un impertinent en face de soi, l’interloque…

Ainsi, toutes deux faisaient les folles, s’en allaient en courses éloignées. Elles faisaient enrager des vieux qui les gobaient ; après avoir festoyé à leurs dépens dans un joli site, elles prenaient des mines froides, quasi hautaines, vis-à-vis le bonhomme, de cela tout ébahi. Il y en avait un postiche, au nez cartonné, à la paume des mains écailleuse ; devant lui, elles l’appelaient l’homme aux huîtres…

À la vie dissolue de Lazarine assistait sa petite. Sa mère, elle la regardait à sa toilette se maquiller, elle l’écoutait, le bras sur la figure, lui dire aux visiteurs : « Embrasse papa qui revient d’Afrique ». Sinistre hochet que ce mot de papa, dont le sens confusément se perdait en une attribution générale pour l’enfant, prostituant dans sa petite innocence ses premières caresses. Cependant, Lazarine n’eut permis à Blondinette, qu’elle habillait richement de velours bleu ou grenat, d’omettre dans sa couchette le signe de croix et une courte prière, où n’était oublié le vrai papa mort. Elle disait qu’après tout elle saurait forcer sa fille à une vie honnête.