Page:Poictevin - Ludine, 1883.djvu/18

Cette page n’a pas encore été corrigée

à grosses ruches, elle attendait dans la peine de son brave cœur. Et ses yeux brillaient jeunes, entre ses paupières sans cils, éraillées, que par instant elle serrait bien fort. Le curé, sans rien dire, épandait des bénédictions sur l’enfant que, de son village au Jura, Séraphine lui amenait. Déjà trois ans ! et pas une parole d’articulée ! Cependant, avec sa simple attitude, il témoignait d’une intussusception des êtres, de leurs arcanes. Sous les rides de son visage immatérialisé, se linéamentaient les expressions translucides. Puis, il narre, tel qu’un fait ordinaire qu’on cite, une destinée agitée. Sans phrases, il confie à l’inquiète vieille que la petite Ludine n’échappera pas à des souffrances, à des misères. « Oh ! vous pouvez empêcher le malheur, monsieur le curé. Le bon Dieu vous donne tout pouvoir sur les pauvres créatures.. » Mais le curé d’arrêter d’un geste les supplications exorbitantes de l’excellente femme.

Fermant les yeux dans une contraction douce de ses traits, il a agité les lèvres, s’est adressé une dernière fois aux Puissances.. Il ne peut faire davantage. Qu’est-il autre qu’un intercesseur auprès de Dieu, de ses Anges ! Humble et fervente a été sa prière. La petite Ludine surmontera peut-être les maux de la vie. Et la vieille bonne s’en va, bénie elle aussi du curé d’Ars.