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Mille tonnerres ! jura le prince de Grenouille.

Mille tiaples ! » grogna l’électeur de Bluddennuff.

Cela ne pouvait pas passer ainsi. Je me fâchai. Je me tournai brusquement vers Bluddennuff.

« Monsieur ! lui dis-je, vous êtes un babouin.

— Monsieur ! répliqua-t-il après une pause, Donnerre et églairs ! »

Je n’en demandais pas davantage. Nous échangeâmes nos cartes. À Chalk-Farm, le lendemain matin, je lui abattis le nez, — et puis je me présentai chez mes amis.

« Bête ! dit le premier.

— Sot ! dit le second.

— Butor ! dit le troisième.

— Âne ! dit le quatrième.

— Benêt ! dit le cinquième.

— Nigaud ! dit le sixième.

— Sortez ! » dit le septième.

Je me sentis très mortifié de tout cela, et j’allai voir mon père.

« Mon père, lui demandai-je, quel est le but principal de mon existence ?

— Mon fils, répliqua-t-il, c’est toujours l’étude de la nosologie ; mais, en frappant l’électeur au nez, vous avez dépassé votre but. Vous avez un fort beau nez, c’est vrai ; mais Bluddennuff n’en a plus. Vous êtes sifflé, et il est devenu le héros du jour. Je vous accorde que, dans Fum-Fudge, la grandeur d’un lion est proportionnelle à la dimension de sa trompe ; — mais, bonté divine ! il n’y a pas de rivalité possible avec un lion qui n’en a pas du tout. »