lèvres, une pensée informe de joie, — d’espérance, — traversa mon esprit. Cependant, qu’y avait-il de commun entre moi et l’espérance ? C’était, dis-je, une pensée informe ; — l’homme en a souvent de semblables qui ne sont jamais complétées. Je sentis que c’était une pensée de joie, — d’espérance ; mais je sentis aussi qu’elle était morte en naissant. Vainement je m’efforçai de la parfaire, — de la rattraper. Ma longue souffrance avait presque annihilé les facultés ordinaires de mon esprit. J’étais un imbécile, — un idiot.
La vibration du pendule avait lieu dans un plan faisant angle droit avec ma longueur. Je vis que le croissant avait été disposé pour traverser la région du cœur. Il éraillerait la serge de ma robe, — puis il reviendrait et répéterait son opération, — encore, — et encore. Malgré l’effroyable dimension de la courbe parcourue (quelque chose comme trente pieds, peut-être plus) et la sifflante énergie de sa descente, qui aurait suffi pour couper même ces murailles de fer, en somme, tout ce qu’il pouvait faire, pour quelques minutes, c’était d’érailler ma robe. Et sur cette pensée je fis une pause. Je n’osais pas aller plus loin que cette réflexion. Je m’appesantis là-dessus avec une attention opiniâtre, comme si, par cette insistance, je pouvais arrêter là la descente de l’acier. Je m’appliquai à méditer sur le son que produirait le croissant en passant à travers mon vêtement, — sur la sensation particulière et pénétrante que le frottement de la toile produit sur les nerfs. Je méditai sur toutes ces futilités, jusqu’à ce que mes dents fussent agacées.
Plus bas, — plus bas encore, — il glissait toujours plus bas. Je prenais un plaisir frénétique à comparer sa vitesse de haut en bas avec sa vitesse latérale. À droite, — à gauche, — et puis il fuyait loin, loin, et puis il revenait, — avec le glapissement d’un esprit damné ! — jusqu’à mon cœur, avec l’allure furtive du tigre ! Je riais et je hurlais alternativement, selon que l’une ou l’autre idée prenait le dessus.