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marquer le lit avec une sorte de précision négligée tout à fait pittoresque. Des bouquets de fleurs sauvages s’élançaient partout, dans les intervalles, avec exubérance.

Que conclure de tout cela, je n’en savais naturellement rien. Indubitablement, il y avait là de l’art ; ce n’était pas ce qui me surprenait ; toutes les routes, dans le sens ordinaire, sont des ouvrages d’art ; et je ne peux pas dire non plus qu’il y eût beaucoup lieu de s’étonner de l’excès d’art manifesté ; tout ce qui semblait avoir été fait ici pouvait avoir été fait avec les ressources naturelles (comme disent les livres qui traitent du jardin-paysage), avec très-peu de peine et de dépense. Non ; ce n’était pas la quantité, mais le caractère de cet art, qui m’arrêta et me poussa à m’asseoir sur une de ces pierres fleuries, pour contempler en tous sens cette avenue féerique, pendant une demi-heure au moins, avec ravissement. Il y avait une chose qui, à mesure que je regardais, devenait de plus en plus évidente, c’est qu’un artiste, doué de l’œil le plus délicat à l’endroit de la forme, avait présidé à tous ces arrangements. On avait pris le plus grand soin pour