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« Nous avions ici autrefois un gaillard, — dit un gros petit monsieur, assis à ma droite, — qui se croyait théière ; et, soit dit en passant, n’est-ce pas chose remarquable que cette lubie particulière entre si souvent dans la cervelle des fous ? Il n’y a peut-être pas en France un hospice d’aliénés qui ne puisse fournir une théière humaine. Notre monsieur était une théière de fabrique anglaise, et il avait soin de se polir lui-même tous les matins avec une peau de daim et du blanc d’Espagne.

— Et puis, — dit un grand homme, juste en face, — nous avons eu, il n’y a pas bien longtemps, un individu qui s’était fourré dans la tête qu’il était un âne, — ce qui, métaphoriquement parlant, direz-vous, était parfaitement vrai. C’était un malade très-fatigant, et nous avions beaucoup de peine à l’empêcher de dépasser toutes les bornes. Pendant un assez long temps, il ne voulut manger que des chardons ; mais nous l’avons bientôt guéri de cette idée en insistant pour qu’il ne mangeât pas autre chose. Il était sans cesse occupé à ruer avec ses talons… comme ça, tenez… comme ça…

— Monsieur de Kock ! je vous serais bien obligée,