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jours. Comme je courais à grande vitesse, le nez en l’air, et ne m’occupant que du ravisseur de ma propriété, je m’aperçus subitement que mes pieds ne touchaient plus la terre ferme ; le fait est que je m’étais jeté dans un précipice, et que j’aurais été infailliblement brisé en morceaux, si, pour mon bonheur, je n’avais saisi une corde suspendue à un ballon qui passait par là.

Aussitôt que j’eus suffisamment recouvré mes sens pour comprendre la terrible position dans laquelle j’étais situé (ou plutôt suspendu), je déployai toute la force de mes poumons pour faire connaître cette position à l’aéronaute placé au-dessus de moi. Mais pendant longtemps je m’époumonai en vain. Ou l’imbécile ne pouvait pas me voir, ou méchamment il ne le voulait pas. Cependant la machine s’élevait rapidement, pendant que mes forces s’épuisaient plus rapidement encore.

Je fus bientôt au moment de me résigner à mon destin et de me laisser tomber tranquillement dans la mer, quand tous mes esprits furent soudainement ravivés par le son d’une voix caverneuse qui partait d’en haut et qui semblait bourdonner nonchalam-