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de dés a amené les six deux fois coup sur coup, ce fait est une raison suffisante de parier gros que le troisième coup ne ramènera pas les six. Une opinion de ce genre est généralement rejetée tout d’abord par l’intelligence. On ne comprend pas comment les deux coups déjà joués, et qui sont maintenant complètement enfouis dans le passé, peuvent avoir de l’influence sur le coup qui n’existe que dans le futur. La chance pour amener les six semble être précisément ce qu’elle était à n’importe quel moment, c’est-à-dire soumise seulement à l’influence de tous les coups divers que peuvent amener les dés. Et c’est là une réflexion qui semble si parfaitement évidente, que tout effort pour la controverser est plus souvent accueilli par un sourire moqueur que par une condescendance attentive. L’erreur en question, grosse erreur, grosse souvent de dommages, ne peut pas être critiquée dans les limites qui me sont assignées ici ; et pour les philosophes elle n’a pas besoin de l’être. Il suffit de dire qu’elle fait partie d’une infinie série de méprises auxquelles la Raison s’achoppe dans sa route, par sa propension malheureuse à chercher la vérité dans le détail.


FIN DES HISTOIRES EXTRAORDINAIRES

ET DU TOME CINQUIÈME.