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l’esprit un curieux apophtegme d’un vieux loup de mer hollandais.

— Cela est positif, disait-il toujours quand on exprimait quelque doute sur sa véracité, comme il est positif qu’il y a une mer où le navire lui-même grossit comme le corps vivant d’un marin.

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Il y a environ une heure, je me suis senti la hardiesse de me glisser dans un groupe d’hommes de l’équipage. Ils n’ont pas eu l’air de faire attention à moi, et, quoique je me tinsse juste au milieu d’eux, ils paraissaient n’avoir aucune conscience de ma présence. Comme celui que j’avais vu le premier dans la cale, ils portaient tous les signes d’une vieillesse chenue. Leurs genoux tremblaient de faiblesse ; leurs épaules étaient arquées par la décrépitude ; leur peau ratatinée frissonnait au vent ; leur voix était basse, chevrotante et cassée ; leurs yeux distillaient les larmes brillantes de la vieillesse, et leurs cheveux gris fuyaient terriblement dans la tempête. Autour d’eux, de chaque côté du pont, gisaient éparpillés des instruments mathématiques d’une structure très-ancienne et tout à fait tombée en désuétude.

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J’ai parlé un peu plus haut d’une bonnette qu’on avait installée. Depuis ce moment, le navire, chassé par le vent, n’a pas discontinué sa terrible course droit au sud, chargé de toute sa toile disponible, depuis ses pommes de mâts jusqu’à ses bouts-dehors inférieurs,