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rayons de ma destinée vont, je crois, se concentrant et s’engloutissant dans un foyer. Incompréhensibles gens ! Enveloppés dans des méditations dont je ne puis deviner la nature, ils passent à côté de moi sans me remarquer. Me cacher est pure folie de ma part, car ce monde-là ne veut pas voir. Il n’y a qu’un instant, je passais juste sous les yeux du second ; peu de temps auparavant, je m’étais aventuré jusque dans la cabine du capitaine lui-même, et c’est là que je me suis procuré les moyens d’écrire ceci et tout ce qui précède. Je continuerai ce journal de temps en temps. Il est vrai que je ne puis trouver aucune occasion de le transmettre au monde ; pourtant, j’en veux faire l’essai. Au dernier moment j’enfermerai le manuscrit dans une bouteille, et je jetterai le tout à la mer.

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Un incident est survenu qui m’a de nouveau donné lieu à réfléchir. De pareilles choses sont-elles l’opération d’un hasard indiscipliné ? Je m’étais faufilé sur le pont et m’étais étendu, sans attirer l’attention de personne, sur un amas d’enfléchures et de vieilles voiles, dans le fond de la yole. Tout en rêvant à la singularité de ma destinée, je barbouillais, sans y penser, avec une brosse à goudron, les bords d’une bonnette soigneusement pliée et posée à côté de moi sur un baril. La bonnette est maintenant tendue sur ses bouts-dehors, et les touches irréfléchies de la brosse figurent le mot découverte.

J’ai fait récemment plusieurs observations sur la