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vive exaltation. Durant cet intervalle, nous déterrâmes complètement un coffre de forme oblongue, qui, à en juger par sa parfaite conservation et son étonnante dureté, avait été évidemment soumis à quelque procédé de minéralisation, — peut-être au bichlorure de mercure. Ce coffre avait trois pieds et demi de long, trois de large et deux et demi de profondeur. Il était solidement maintenu par des lames de fer forgé, rivées et formant tout autour une espèce de treillage. De chaque côté du coffre, près du couvercle, étaient trois anneaux de fer, six en tout, au moyen desquels six personnes pouvaient s’en emparer. Tous nos efforts réunis ne réussirent qu’à le déranger légèrement de son lit. Nous vîmes tout de suite l’impossibilité d’emporter un si énorme poids. Par bonheur, le couvercle n’était retenu que par deux verrous que nous fîmes glisser, — tremblants et pantelants d’anxiété. En un instant, un trésor d’une valeur incalculable s’épanouit, étincelant, devant nous. Les rayons des lanternes tombaient dans la fosse, et faisaient jaillir d’un amas confus d’or et de bijoux des éclairs et des splendeurs qui nous éclaboussaient positivement les yeux.

Je n’essayerai pas de décrire les sentiments avec lesquels je contemplais ce trésor. La stupéfaction, comme on peut le supposer, dominait tous les autres. Legrand paraissait épuisé par son excitation même, et ne prononça que quelques paroles. Quant à Jupiter, sa figure devint aussi mortellement pâle que cela est possible à une figure de nègre. Il semblait stupéfié, foudroyé.