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tonner ; elle est démentie par la voix du monde entier. Vous n’avez pas l’intention de mettre à néant l’idée mûrie par plusieurs siècles. La raison mathématique est depuis longtemps regardée comme la raison par excellence.

Il y a à parier, répliqua Dupin, en citant Chamfort, que toute idée politique, toute convention reçue est une sottise, car elle a convenu au plus grand nombre. Les mathématiciens, — je vous accorde cela, — ont fait de leur mieux pour propager l’erreur populaire dont vous parlez, et qui, bien qu’elle ait été propagée comme vérité, n’en est pas moins une parfaite erreur. Par exemple, ils nous ont, avec un art digne d’une meilleure cause, accoutumés à appliquer le terme analyse aux opérations algébriques. Les Français sont les premiers coupables de cette tricherie scientifique ; mais, si l’on reconnaît que les termes de la langue ont une réelle importance, — si les mots tirent leur valeur de leur application, — oh ! alors, je concède qu’analyse traduit algèbre, à peu près comme en latin ambitus signifie ambition ; religio, religion ; ou homines honesti, la classe des gens honorables.

— Je vois, dis-je, que vous allez vous faire une querelle avec un bon nombre d’algébristes de Paris ; — mais continuez.

— Je conteste la validité, et conséquemment les résultats d’une raison cultivée par tout procédé spécial autre que la logique abstraite. Je conteste particulièrement le raisonnement tiré de l’étude des mathéma-