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ception de l’Infini, par un raisonnement aussi maladroit que celui qui est généralement employé.

Néanmoins il m’est permis, en tant qu’individu, de dire que je ne puis pas concevoir l’Infini, et que je suis convaincu qu’aucun être humain ne le peut davantage. Un esprit, qui n’a pas une entière conscience de lui-même, qui n’est pas habitué à faire une analyse intérieure de ses propres opérations, pourra, il est vrai, devenir souvent sa propre dupe et croire qu’il a conçu l’idée dont je parle. Dans nos efforts pour la concevoir, nous procédons pas à pas ; nous imaginons toujours un degré derrière un degré ; et aussi longtemps que nous continuons l’effort, on peut dire avec raison que nous tendons vers la conception de l’idée en vue ; mais la force de l’impression que nous parvenons, ou que nous sommes parvenus à créer, est en raison de la période de temps durant lequel nous maintenons cet effort intellectuel. Or, c’est par le fait de l’interruption de l’effort, — c’est en parachevant (nous le croyons du moins) l’idée postulée, — c’est en donnant, comme nous nous le figurons,