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ténébreux de la métaphysique, Kepler reconnaissait qu’il les avait devinées. Oui ! ces lois vitales, Kepler les a devinées ; disons même qu’il les a imaginées. S’il avait été prié d’indiquer par quelle voie, d’induction ou de déduction, il était parvenu à cette découverte, il aurait pu répondre : « Je ne sais rien de vos routes, mais je connais la machine de l’Univers. Telle elle est. Je m’en suis emparé avec mon âme ; je l’ai obtenue par la simple force de l’intuition. » Hélas ! pauvre vieil ignorant ! Quelque métaphysicien lui aurait peut-être répondu que ce qu’il appelait intuition n’était que la certitude résultant de déductions ou d’inductions dont le développement avait été assez obscur pour échapper à sa conscience, pour se soustraire aux yeux de sa raison ou pour défier sa puissance d’expression. Quel malheur que quelque professeur de philosophie ne l’ait pas éclairé sur toutes ces choses ! Comme cela l’eût réconforté sur son lit de mort, d’apprendre que, loin d’avoir marché intuitivement et scandaleusement, il avait, en réalité, cheminé suivant la méthode honnête et légitime, c’est-à-dire à la ma-