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l’auteur de la proposition. Il faut qu’un arbre, affirme M. Mill, soit ou ne soit pas un arbre. Fort bien ; et maintenant qu’il me soit permis de lui demander pourquoi. À cette petite question il n’a qu’une réponse à faire ; je défie tout homme vivant d’en inventer une autre. Cette seule réponse possible, c’est : Parce que nous sentons qu’il est impossible de comprendre qu’un arbre puisse être autre chose qu’un arbre ou un non-arbre. Voilà donc, je le répète, la seule réponse de M. Mill ; il ne prétendra pas en inventer une autre ; et cependant, d’après sa propre démonstration, sa réponse évidemment n’est pas une réponse ; car ne nous a-t-il pas déjà sommés d’admettre, comme un axiome, que la possibilité ou l’impossibilité de comprendre ne doit, en aucun cas, être considérée comme critérium de vérité axiomatique ? Ainsi son argumentation tout entière fait naufrage. Qu’on ne prétende pas qu’une exception à la règle générale puisse avoir lieu dans des cas où l’impossibilité de comprendre est aussi manifeste qu’en celui-ci, où nous sommes invités à concevoir un arbre qui