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sa dignité de grand écrivain. Il s’abaisse dans une lettre, à prouver sa véracité, mise en doute dans une circonstance grave par le mari de Mme  R. Poe dut éprouver à la fin de sa vie l’aliénation singulière qu’il a analysée dans son Homme des foules. Il connut « le grand malheur de ne pouvoir être seul. »

Il s’était remis à travailler au commencement de 1849. Il composa quelques essais de critique, écrivit le Cottage Landor et Hop-Frog, reprit ses Marginalia. En avril, il fut ressaisi par son vice. Il se trouvait de nouveau dans les circonstances précaires qui avaient déterminé antérieurement ses accès d’ivrognerie. Il était sans emploi, sentait diminuer ses forces, savait sa vie dépendante du placement fortuit de ses articles, à une époque où son énergie commençant à décliner tandis que la prévision de son intelligence demeurait nette, il dut souffrir le plus durement de ne rien pouvoir anticiper de stable. Ces incertitudes l’abattirent de nouveau. Il but, tomba malade gravement, et quand Mme  Clemm en écrivit à Mme  R. la vieille femme eut ces paroles lamentables : « Dieu le sait ; je voudrais que nous fussions tous deux dans nos tombes ; en vérité, cela vaudrait mieux. »

Poe se rétablit ; il revint à son idée fixe d’avoir un magazine à lui, et voulut retourner dans le Sud, pour y chercher aide, bien que ses voyages précédents ne lui eussent servi à rien. Il fut empêché de se mettre en route, jusqu’au 30 juin. Le soir, avant son départ, il dîna chez Mme  Lewis, femme de lettres connue sous le pseudonyme de « Stella. » Il était triste et parut agité par le pressentiment de sa mort. En rentrant chez lui, il indiqua même, à Mme Clemm, ce qu’elle devait faire de ses papiers s’il ne revenait pas. Le lendemain il partit et la vieille femme ne le revit plus.

La biographie publiée par M. Ingram contient en tête, la