Page:Poe - Contes grotesques trad. Émile Hennequin, 1882.djvu/174

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Nous nous trouvions dans le pays habité par les Sioux, tribu guerrière et cruelle, qui, en plusieurs occasions, avait montré sa haine des blancs, et qui était constamment en lutte avec ses voisins. Les Canadiens[1] en avaient long à raconter sur la barbarie de ces sauvages, et je craignais énormément que ces peureux ne saisissent la première occasion de déserter et de s’en revenir vers le Mississipi. Pour diminuer leurs chances de fuite, je remplaçai l’un d’eux dans la pirogue par Poindexter Greely, et je pris le Canadien avec moi dans la grande barque. Tous les Greely revinrent à bord, abandonnant leurs chevaux. Voici comment nous étions disposés. Dans la pirogue, Poindexter Greely, Tobie, un Canadien et Pierre Junôt. Dans la barque : Thornton et son chien Neptune, le Prophète, John, Franck, Robert et Meredith Greely, trois Canadiens et moi.

Nous mîmes à la voile, au crépuscule, et, comme nous avions un bon vent du sud, nous avançâmes rapidement. Cependant, à la tombée de la nuit, des barres de sable mouvant nous avaient donné fort à faire. Nous pûmes marcher sans interruption, jusqu’au point du jour. À ce moment, nous sommes entrés dans l’embouchure d’un petit affluent, où nous avons caché les bateaux sous le taillis.

3 et 4 septembre. Pendant ces deux jours, il a plu et

  1. Quatre Canadiens faisaient partie de l’expédition. Le reste était formé par les cinq frères Greely, trappeurs du Kentucky, un Virginien, Wormley surnommé le Prophète, un nègre, Tobie, et un autre Virginien, Thornton, l’ami particulier de Rodman. L’associé de ce dernier, Pierre Junôt, était le quatorzième. Un des Canadiens était mort dès le début.