devenu un homme, il pouvait à peine dire une phrase sans l’accompagner d’une invite au jeu. Non pas que réellement il ouvrit des paris ; je veux rendre à mon ami cette justice qu’il se serait plutôt ouvert le ventre. Chez lui, c’étaient là de simples manières de parler. Ses expressions de ce chef n’avaient aucun sens. Elles étaient purement, sinon innocemment, explétives, imaginatives, faites pour arrondir la phrase. Quand il disait « je vous parie cela ou cela, » personne ne songeait à le prendre au sérieux.
Cependant, je ne pus m’empêcher de croire que je devais lui marquer mon déplaisir à ce sujet. C’était une habitude immorale ; je le lui dis. C’était une habitude vulgaire, je le priai d’en être assuré. Elle était désavouée par la bonne société. — je n’affirmais là rien qui ne fût vrai. Elle était interdite par un acte du congrès, — je n’avais nullement l’intention de mentir. Je lui fis des remontrances, — mais sans effet. Je démontrai, — en vain. Je suppliai, — il sourit. J’implorai, — il rit. Je prêchai, — il se mit à ricaner. Je menaçai, — il jura. Je lui donnai des coups de pied, — il appela la police. Je lui tirai le nez, — il se moucha, et paria sa tête au diable que je n’oserais pas recommencer.
Tobias Dieumedamne devait encore à sa mère un second défaut ; son dénûment. Il était horriblement pauvre. Et c’était pour cela, sans doute, que ses expressions explétives sur les paris prenaient rarement un tour pécuniaire. Je ne puis pas affirmer que je lui aie jamais entendu prononcer une phrase telle que : « Je vous parie un dollar. » Non, il disait habituellement