Page:Poe - Contes grotesques trad. Émile Hennequin, 1882.djvu/149

Cette page a été validée par deux contributeurs.

de l’y poser doucement, la place par terre manquant. Après cela vint un silence de mort et je n’entendis plus rien pendant les deux nuits, jusqu’au lever du jour. À moins peut-être que je ne doive faire mention d’une sorte de souffle sonore qu’il me sembla percevoir, comme un sanglot ou un murmure, si bas qu’il était presque insaisissable. Il se peut même, en somme, que ce dernier bruit n’existât qu’en mon imagination. Je dis que cela me parut ressembler à un sanglot ou à un chuchotement, mais ce ne pouvait être aucun des deux. Je pense plutôt que les oreilles me cornaient, ou que Wyatt, pendant la nuit, donnait simplement carrière à son enthousiasme, se livrait à ses accès d’adoration artistique. Il avait ouvert sa caisse oblongue, pour réjouir ses yeux par le trésor qu’elle contenait. Il n’y avait là rien qui pût le faire sangloter. Je le répète donc, ce devait simplement être une illusion de mon cerveau surexcité par le thé vert du capitaine Hardy.

Un moment avant le lever du jour dans chacune des deux nuits où je veillai, j’entendis distinctement M. Wyatt replacer le couvercle sur la caisse, et replanter les clous à leur ancienne place au moyen du maillet emmitouflé. Ayant fait cela, l’artiste sortait de sa cabine, complètement vêtu, et allait appeler Mme Wyatt.

Nous avions été sur mer depuis une semaine, nous avions passé le cap Hatteras, quand vint un terrible coup de vent du sud-ouest. Nous nous trouvions en quelque mesure prêts à le recevoir, le temps ayant menacé depuis quelques jours. Tout avait été rangé en haut, en bas, et comme la brise fraîchissait constamment, nous