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vous à qui la nature donna, avec la tendresse du cœur, la force héroïque, vous qui voyez encore fleurir le lis de l’innocence. Malheur à moi ! mon cœur s’est attendri, et l’émotion que j’éprouvai est la hache de mon supplice. Malheur à moi ! dans les bras d’un homme parjure la vertu de Louise s’endormit !

Hélas ! pendant que je m’en vais vers le tombeau, peut-être que cet homme au cœur de vipère m’oublie auprès d’une autre, s’égaye à une table de toilette, joue avec les cheveux de sa nouvelle conquête, et reçoit le baiser qu’elle lui donne, tandis que sur l’échafaud mon sang va jaillir de mon corps mutilé.

Joseph ! Joseph ! que le chant de mort de Louise te poursuive au loin, que les gémissements de la cloche retentissent comme un avertissement terrible à ton oreille ! Qu’ils ouvrent tout à coup une plaie infernale dans les images de la volupté, quand une bouche trop tendre te murmurera des paroles d’amour !

Ah ! traître, rien n’a pu t’émouvoir, ni les douleurs de Louise, ni la honte de la femme, ni l’enfant que je portais dans mon sein, ni l’émotion qui attendrit le tigre et le lion.

Son navire s’éloigna fièrement du rivage. Mes regards obscurcis le suivaient. À présent il fait entendre