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La terre a reçu le métal, le moule est heureusement rempli ; la cloche en sortira-t-elle assez parfaite pour récompenser notre art et notre labeur ? Si la fonte n’avait pas réussi ! si le moule s’était brisé ! Hélas ! pendant que nous espérons, peut-être le mal est-il déjà fait.

Nous confions l’œuvre de nos mains aux entrailles du sol. Le laboureur leur confie ses semences, espérant qu’elles germeront pour son bien, selon les desseins du ciel. Nous ensevelissons dans le sein de la terre des semences encore plus précieuses, espérant qu’elles se lèveront du cercueil pour une meilleure vie.

Dans la tour de l’église retentissent les sons de la cloche, les sons lugubres qui accompagnent le chant du tombeau, qui annoncent le passage du voyageur que l’on conduit à son dernier asile. Hélas ! c’est une épouse chérie, c’est une mère fidèle que le démon des ténèbres arrache aux bras de son époux, aux tendres enfants qu’elle mit au monde avec bonheur, qu’elle nourrit sur son sein avec amour. Hélas ! les doux liens sont à jamais brisés, car elle habite désormais la terre des ombres, celle qui fut la mère de famille. C’en est fait de sa direction assidue, de sa vigilante sollicitude, et désormais l’étrangère régnera sans amour à son foyer désert.

Pendant que la cloche se refroidit, reposons-nous