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Un printemps perpétuel égaye sans cesse ces champs paisibles. Les heures s’écoulent dans des rêves d’or. L’âme plane dans les espaces infinis, la vérité déchire son voile.

Une joie inaltérable remplit le cœur entier. Ici on ignore le nom de la souffrance ! ce qu’on appelle douleur est un doux transport.

Ici, le pèlerin, quittant à tout jamais son fardeau, repose ses membres fatigués à l’ombre des arbres où le vent mélodieux soupire. Ici, le laboureur laisse tomber sa faucille, et, assoupi par les accords des harpes, il rêve qu’il voit des épis coupés.

Celui dont les drapeaux flottaient comme un orage, celui dont les oreilles n’entendaient que le bruit des combats, celui qui dans sa marche audacieuse faisait trembler les montagnes, dort ici près d’un ruisseau limpide qui coule avec un doux murmure, et n’entend plus le cliquetis de l’épée.

Ici, les époux fidèles s’embrassent sur une herbe fraîche, où passe un vent embaumé. Ici, l’amour reçoit sa couronne. À l’abri désormais des coups de la mort, il célèbre son éternelle fête nuptiale.