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CASSANDRE.

La joie régnait dans le palais de Troie avant la chute des hauts remparts de cette ville. On entendait résonner les chants de triomphe et les cordes des lyres d’or. Tous les bras se reposaient d’un douloureux combat, car le fils de Pélée demandait en mariage la fille de Priam.

Des groupes parés de laurier s’en vont solennellement vers la demeure des Dieux, vers l’autel d’Apollon. Dans les rues règne une folle joie : un seul être reste livré à sa douleur.

Seule et farouche, privée de toute joie, au milieu de la joie générale, Cassandre erre à l’écart dans le bois de laurier consacré à Apollon. Elle se retire au fond de la forêt et jette sur le sol son bandeau de prêtresse.

« Tout est livré à la joie, dit-elle, tous les cœurs sont heureux, les vieux parents espèrent et ma sœur a revêtu sa parure. Moi seule je suis solitaire et triste ; car les doux pressentiments s’éloignent de moi, et je vois s’approcher de ces murs les ailes du malheur.