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les parfums, et le hêtre m’offre sous ses larges rameaux un toit pompeux, une fraîcheur attrayante. Dans les détours de la forêt le paysage disparaît à mes yeux, et je monte plus loin par le chemin qui serpente. À travers le réseau de feuillage pénètrent quelques rares rayons, et l’azur du ciel qui me sourit. Mais tout à coup ce voile se déchire, la forêt s’ouvre et je retrouve l’éblouissante clarté du jour. L’espace immense s’étend sous mes yeux, et une montagne bleuâtre entourée de vapeurs s’élève à l’horizon. Au pied de la cime élevée et escarpée je vois se dérouler comme une glace les vagues du fleuve, au-dessous de moi et sur ma tête est l’immensité. De quelque côté que mes regards se tournent, j’éprouve un sentiment de terreur ou une idée de vertige. Mais entre ces sommités inébranlables et ces profondeurs terribles un chemin assuré s’ouvre au voyageur. Devant moi sont des rives fécondes, devant moi une vallée superbe cultivée avec zèle. Ces lignes qui séparent les domaines du laboureur, c’est Démétrius qui les a tracées sur les tapis de verdure. Heureuse puissance de la loi du Dieu qui gouverne les hommes depuis que l’amour s’est enfui du monde. Mais dans les champs irréguliers qui tournent et serpentent, qui tantôt touchent à la forêt, qui tantôt s’élèvent sur la colline, on distingue une trace brillante : c’est la route qui réunit plusieurs pays. Sur le fleuve paisible flottent les radeaux ; la