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« Est-ce ainsi, dit-elle, que je dois retrouver l’homme, auquel nous avons prêté notre image, et dont la forme idéale brille dans l’Olympe ? Ne lui avons-nous pas donné le sein de la terre, et dans son royal empire il erre malheureux comme un exilé ? »

« Aucun Dieu n’aura-t-il pitié de lui ? aucun être céleste ne l’enlèvera-t-il d’une main puissante à cette misère profonde ? L’Olympe heureux n’est point ému des larmes de l’humanité ; mais elles touchent vivement mon cœur.

« Pour que l’homme devienne homme, il faut qu’il forme un pacte éternel et confiant avec la terre, qui est sa mère ; qu’il honore la loi des temps, le cours sacré des astres, dans leurs mouvements harmonieux. »

Elle écarte doucement le nuage qui la voile aux regards et se montre tout à coup, au milieu des hordes sauvages, dans sa divine majesté. Ces hommes célébraient leur victoire dans un festin, et ils offrirent à Cérès une coupe pleine de sang.

Elle la repousse avec horreur et leur dit : « Le sang n’arrose point les lèvres des Dieux. Les êtres divins n’exigent point de sacrifices. C’est en leur offrant les fruits de l’automne et les dons des champs, qu’on leur rend hommage. »

Elle enlève la lance que le chasseur tient à sa