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DIVERSES

L’Amour vaut cent fois mieux, tout dangereux qu’il est.
À d’agréables maux son caprice nous livre ;
On n’a point avec lui d’inutiles momens ;
Tout est plaisir pour les amans.
À sa tendresse, hélas ! pourquoi faut-il survivre !
Peut-on s’accoutumer à ne sentir plus rien ?
Et pour les cœurs enfin le calme est-il un bien ?
Non, non, Reviens, Amour, chasse par ta présence
Cet ennuyeux loisir qui suit l’indifférence ;
Rassemble tous tes feux pour rallumer le mien.
Hélas ! tu ne viens point ; vainement je t’appelle.
Que mon aventure est cruelle !
Malgré moi tu sus m’enflammer,
Et quand je veux que mon feu renouvelle,
Tu ne veux pas le rallumer.
Que t’aurait-il coûté de me soumettre encore ?
Pourquoi refuses-tu mes vœux ?
Tes plaisirs ne sont point le secours que j’implore.
Je ne demande pas de ces destins heureux
Que l’on désire tant, que tu fais quand tu veux,
À toutes tes rigueurs je suis accoutumée.
La haine de l’ingrat qui m’avait su charmer
Me défend de prétendre au plaisir d’être aimée ;
Je ne veux que celui d’aimer.
Qu’à s’alarmer, hélas ! mon esprit est facile !