Page:Poésies de Madame Deshoulières 1824.djvu/46

Cette page a été validée par deux contributeurs.
28
POÉSIES

Qui, par des sentiers peu battus,
Marcha d’un pas égal vers la solide gloire.

Muses, vertus, hélas ! qui sera votre appui ?
Et qui regardera comme d’affreux spectacles
Votre misère et votre ennui ?
Qui vous écoutera ? qui voudra comme lui
Vous conduire, à travers d’innombrables obstacles,
Au grand roi qui règne aujourd’hui ?
Ah ! qu’une telle perte ouvre de précipices !
Qu’elle va vous livrer à d’injustes caprices !
Que de dédains et de dégoûts !
Muses, vertus, hélas ! l’ignorance et les vices
Peut-être par sa mort triompheront de vous.

Injustice de la nature !
Les arbres dont l’ombrage embellit ces coteaux
Ne craignent point des ans l’irréparable injure ;
Leur vieillesse ne sert qu’à les rendre plus beaux :
Après avoir d’un siècle achevé la mesure,
Ils passent bien avant dans des siècles nouveaux.
Où voit-on quelque homme qui dure
Autant que les sapins, les chênes, les ormeaux ?

Mais pourquoi m’amuser, dans ma douleur mortelle,