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POÉSIES

Dans cet antre, où l’Amour tant de fois fut vainqueur,
Quelque fierté dont on se pique,
On sent élever dans son cœur
Ce trouble dangereux par qui l’amour s’explique,
Quand il alarme la pudeur.

Ce n’est pas seulement dans cet antre écarté
Qu’il reste de leurs feux une marque immortelle :
Ce fertile vallon dont on a tant vanté
La solitude et la beauté,
Voit mille fois le jour, dans la saison nouvelle,
Les rossignols, les serins, les pinçons
Répéter sous son vert ombrage
Je ne sais quel doux badinage
Dont ces heureux amans leur donnaient des leçons.

Leurs noms sur ces rochers peuvent encor se lire ;
L’un avec l’autre est confondu ;
Et l’âme à peine peut suffire
Aux tendres mouvemens que leur mélange inspire.
Quel charme est ici répandu !
À nous faire imiter ces amans tout conspire ;
Par les soins de l’Amour leurs soupirs conservés
Enflamment l’air qu’on y respire ;
Et les cœurs qui se sont sauvés