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POÉSIES DE BURNS.


LUATH.

      En vérité, César, ils sont parfois assez malheureux ;
Un paysan à creuser un fossé,
À bâtir un mur avec de sales pierres,
À découvrir une carrière, et autres travaux semblables,
Se soutient, lui, sa femme
Et un tas de petits marmots on guenilles,
Et n’a que le travail de ses mains pour leur donner le vivre et le couvert.
      Et quand il leur arrive de cruels malheurs,
Tels que la perte de la santé ou le manque de maîtres,
Vous croiriez presque qu’un peu plus
Ils vont mourir de froid et de faim ;
Mais, comment cela se fait, je ne l’ai jamais su,
Ils sont, pour la plupart, merveilleusement contents ;
Et des garçons vigoureux, et des filles habiles
S’élèvent de cette mamière.

CÉSAR.

      Mais aussi de voir comme vous êtes dédaignés,
Insultés, maltraités et méprisés !
Seigneur Dieu ! mon cher, notre gentry se soucie si peu
Des gens qui bêchent et qui piochent, et de pareil bétail :
Ils passent aussi arrogants près des pauvres gens
Que je ferais près d’un blaireau pourri.
      J’ai remarqué, le jour où notre laird rend la justice,
Et bien souvent j’en ai eu le cœur triste,
Tout ce que de pauvres diables de tenanciers sans argent
Ont à souffrir d’injures d’un agent :
Il frappe du pied et menace, sacre et jure ;
Il les fait arrêter, saisit leur avoir ;
Et eux doivent se tenir debout d’un air humble,
Et tout entendre, et craindre, et trembler !
Je vois comment vivent ceux qui ont de la fortune ;
Mais certes les pauvres gens doivent être bien malheureux !

LUATH.

      Ils ne sont pas si malheureux qu’on croirait,
Quoique constamment près de tomber dans la misère :
Ils sont si accoutumés à sa vue,
Qu’elle leur cause peu de frayeur.
      Puis la chance et la fortune s’arrangent de telle sorte
Qu’ils ont toujours de quoi vivre, plus ou moins ;
Et, s’ils sont fatigués par un travail soutenu,
Un instant de repos est une douce jouissance.
      La plus chère consolation de leur vie,
Ce sont leurs gros enfants et leurs femmes fidèles ;
Les petits babillards font tout leur orgueil
Et le charme du coin du feu.