reux qui échangent les confidences du jeune âge contre les conseils de l’expérience !
Voyez quel excès de dépravation ! vous êtes jeune, et la chair vous tente ! Vous êtes malheureux, et vous cherchez quelquefois à oublier, à vous étourdir, et vous ne vous refusez pas toute espèce de distractions ! Que dis-je ! vous êtes homme d’honneur et de courage ; vous avez de la délicatesse, de la dignité, de la noblesse dans les sentiments ; vous avez du cœur et du génie, vous avez vingt vertus, et vous n’en avez pas vingt-deux ! Vous êtes pauvre, et vous vous permettez quelques écarts de nous autres riches ! Mais le monde se bouleverse ! À nous riches, à nous heureux, tous les plaisirs défendus ! À nous les jolies filles et les liqueurs enivrantes ! À nous toutes les jouissances ! À vous les leçons, sinon les exemples de continence ! À vous de suer, de haleter sous le faix ; et quand le soir, dételant la charrue, vient vous dégager de votre fardeau, vite au grabat pour y retrouver en songe tous les maux de la réalité ! Car, ne nous y trompons pas, et laissons là les paradoxes des chansons à boire, aux malheureux les mauvais songes, aux heureux les riants fantômes de la porte d’ivoire. La nuit n’est que le miroir trouble du jour.
Mais laissons à Burns lui-même le soin de se justifier en se faisant connaître. On a quelquefois à regretter que des poètes se soient abaissés jusqu’à la vile prose pour nous parler d’eux ; mais c’était dans des préfaces, et en la présence imposante du public. Il ne s’agit ici que d’une confidence ingénue faite à l’amitié, d’une lettre qui, n’étant pas destinée à voir le jour, est écrite avec cet inimitable abandon qu’exclut toute préoccupation de publicité. — « Quand on voit le style naturel, dit Pascal, on est tout étonné et ravi ; car on s’attendait à voir un auteur, et on trouve un homme. »
« Monsieur, écrivait-il en 1787 au docteur Moore,