Page:Poésies complètes de Robert Burns, 1843.djvu/187

Cette page n’a pas encore été corrigée
137
POÉSIES DE BURNS.


Sa joue päle était mouillée de larmes ;
Et, à mesure qu’il touchait sa harpe tremblante,
Et qu’il jouait son chant plaintif,
Les vents, qui se lumentaient dans leurs autres,
Portaicnt les notes à l’écho.
a Vous, oiscaux dispersés, qui chantez d’une voix faible
Les restes du chœur printanier !
Vous, bois, qui répandez à tous les vents
°
Les honneurs de l’année vieillie !
Dans le court espace de quelques mais, gais et jnyoux,
De nouveau vous charmerez l’oreille et l’œil ;
Mais rien dans tout le cours du temps
Ne pourra me rendre la gaicté.
» Je suis un vieil arbre courbé,
Qui a long-temps soutenu le vent et la pluic ;
Mais voici qu’est venu un ouragon cruel,
Et ma dernière attache à la terre est partie :
Aucune de mes feuilles ne saluera le printemps,
Aucun soleil d’été ne fera grandir ma fleur ;
Mais je dois tomber devant la tempête,
Et d’autres se planteront à ma place.
» J’ai vu tant d’années férondes en changements,
Que je suis devenu un étranger sur la terre :
J’erre dans les voics des hommes,
Sans les connaître et sans en être connu :
Ni écouté, ni plaint, ni secouru,
Je porte seul ma charge de soucis ;
Car silencieux, couchés sur leurs lits de poussière,
Gisent tous ceux qui auraient pris part à mes chagrins.
» Et enfin (pour comble de douleur !)
Mon noble maitre git en terre ;
La fleur de nos hardis barons,
L’orgueil de son pays— de son pays l’appui. —
Maintenant je dépéris comme un ètre usé,
Car toute la vie de ma vice est morte,
Et l’espoir s’est dérobé à ma vue vieillie,
Envolé à jamais sur son aile impétueuse.
» Une dernière fois éveille ta triste voix, à ma harpe,
Ta voix de douleur et de désespoir sauvage :
Eveille-toil fais retentir ton dernier chant —
Puis dors désormais en silence !
Et toi, mon dernier, mon meilleur, mon unique ami,
Qui remplis un tombeau préroce ,
42.