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POÉSIES DE BURNS.


ÉPITRE À UN JEUNE AMI.

MAI 1786.

J’ai long-temps pensé, mon jeune ami,
À vous envoyer quelque chose,
Quand cela ne devrait avoir d’autre but
Qu’un affectueux souvenir ;
Mais ce que deviendra mon sujet,
Que le temps et la chance en décident :
Peut-être tournera-t-il en chanson,
Peut-être tournera-t-il en sermon.

Vous allez bientôt vous lancer dans le monde, mon garçon :
Et, croyez-moi, mon cher André,
Vous trouverez les hommes une race étrange,
Et ils pourront vous faire bien du chagrin :
Attendez-vous à des peines et à des soucis,
Même quand votre but est atteint ;
Et toutes vos vues peuvent aboutir à rien,
Quoique chaque nerf ait été tendu.

Je ne dirai pas, les hommes sont tous des scélérats ;
Les méchants réellement endurcis
Qui n’ont d’autre frein que la loi humaine
Sont restreints à un petit nombre ;
Mais, hélas ! les hommes sont très-faibles,
Et l’on ne peut guère se fier à eux ;
Si l’égoïsme dérange la balance chancelante,
Elle est rarement remise droite :

Pourtant ceux qui succombent dans la lutte de la fortune,
Nous ne devrions pas censurer leur destinée ;
Car ils peuvent toujours également accomplir
La fin importante de la vie ;
Un homme peut avoir un cœur honnête,
Quoique la pauvreté ait l’œil sur lui à toute heure ;
Un homme peut prendre le parti d’un voisin,
Et pourtant n’avoir pas d’argent à lui donner.

Toujours franc, contez sur-le-champ votre histoire,
Quand vous êtes avec un cœur éprouvé ;
Mais gardez toujours pour vous-même quelque chose
Que vous ne dites guère à personne.
Garantissez-vous aussi bien que vous pouvez
De la dissection eritique :