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LE BOUCLIER D’HERCULE

dans sa maison avec joie et bonheur. Toute la nuit il reposa près de son épouse, et jouit avec elle des dons de la belle Aphrodite. De ce double commerce avec un dieu et l’un des premiers parmi les mortels, Alcmène devint mère dans Thèbes, dans la ville aux sept portes, de deux fils bien peu semblables entre eux quoique frères, de natures bien inégales : du fort, du redoutable Hercule, engendré par Jupiter qui assemble les nuages, d’Iphiclée, issu du belliqueux Amphitryon, postérité diverse, comme devaient être le rejeton d’un homme, d’un mortel, et celui du fils de Saturne, qui commande à tous les dieux.

Ce héros, après bien d’autres exploits, tua encore Cycnus, fils de Mars, au cœur magnanime. Il le rencontra dans le bois sacré d’Apollon, du dieu qui lance au loin ses traits, son belliqueux père près de lui, tous deux brillants sous leurs armes de l’éclat de la flamme et montés sur le même char. Leurs coursiers frappaient à pas précipités la terre ; du pied de leurs coursiers comme des roues de leur char s’élevait autour d’eux une poussière épaisse ; leur char roulait à grand bruit emporté par leurs coursiers ; ils volaient, et Cycnus se réjouissait, dans l’espoir d’immoler de son glaive d’airain le vaillant fils de Jupiter, avec son écuyer, et de les dépouiller l’un et l’autre de leurs magnifiques armes. Mais ses vœux ne furent point entendus de Phébus Apollon, qui anima contre lui le courage d’Hercule. Tout le bois, l’autel même d’Apollon, du maître de Pégase, était comme éclairé par les armes de Mars, par sa splendeur divine, par le feu qui luisait dans ses yeux. Qui eût osé, simple mortel, s’avancer contre lui, hormis Hercule et l’illustre Iolas ? Mais grande était la force d’Hercule, invincibles étaient les