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LA THÉOGONIE

« Glorieux Zeus, le plus grand des immortels, choisis de ces deux portions celle qui t’agréera le plus. »

Il dit, pensant tromper Zeus ; mais le dieu aux conseils éternels n’était point abusé par sa ruse ; il la connaissait ; déjà, il méditait en lui-même contre les mortels une funeste vengeance, qui devait être accomplie. De ses mains il enleva l’enveloppe de graisse, et un violent courroux s’éleva dans son cœur à la vue des blancs ossements que sous une trompeuse apparence elle recelait. C’est depuis ce temps que sur la terre, chez toutes les races humaines, on brûle les os des victimes sur les autels fumants des dieux.

Cependant Zeus irrité s’écrie :

« Fils de Japet, dont nul n’égale l’adresse, cher Prométhée, tu n’as pas, on le voit, renoncé à la ruse ! »

Ainsi parla, dans sa colère, Zeus aux conseils éternels. Depuis, gardant le souvenir de son injure, il refusa aux mortels, aux malheureux habitants de la terre, le feu, ce puissant et actif élément. Mais il fut encore trompé par l’industrieux fils de Japet, qui sut le lui dérober, en refermant dans la tige d’une férule ses rayons éclatants. Cependant le cœur de Zeus est rongé par le dépit, la colère s’empare de son âme, lorsqu’il voit au loin, dans la demeure des humains, briller le feu qui lui est ravi. Pour se venger, il leur prépare aussitôt un fléau fatal. Par ordre du fils de Cronos, l’illustre boiteux façonne avec de l’argile la pudique image d’une vierge. Athéné aux yeux d’azur la revêt elle-même d’une blanche tunique, et elle-même lui attache sa ceinture ; elle jette sur sa tête un voile d’un merveilleux travail ; elle orne ses